19/09/15

Les nouvelles clés du développement personnel au travail pour concilier qualité de vie et performance durable

La gestion du stress, une compétence managériale ?

Notre mutation et ses nombreux changements génèrent un surcroît de paradoxes, de complexité, de tensions et, in fine, de déséquilibres émotionnels et de frustrations.

C’est vrai de la tristesse, émotion associée au deuil et aux transformations. C’est vrai aussi des peurs permanentes générées par les pressions incessantes de productivité, ou encore sur l’emploi.

Cette situation et ses impacts humains sont en grande partie à l’origine des risques psychosociaux et, principalement, du stress chronique.

Connaissant ces mêmes inquiétudes, les managers sont encore plus exposés au stress au travail.

« Entre le marteau et l’enclume » cette double contrainte est un facteur de risque majeur.

Par ailleurs, leur « devoir de réserve » est particulièrement nuisible à leur équilibre émotionnel. Ne pas pouvoir parler à ses équipes, de situations difficiles ou anxiogènes, empêche en effet de réguler ses émotions.

Un manager me confiait récemment que le malaise allait grandissant dans sa ligne hiérarchique. Il savait que certaines activités risquaient d’être supprimées en France, sans pouvoir en parler. Ces non-dits sapaient la confiance mutuelle et « pourrissaient le climat » (…). « Impossible de redresser la performance, notre plan de succès « FORWARD » est voué dès le départ à l’échec par manque de sens et de confiance et ça, la direction ne veut pas le comprendre…! »

Autre exemple, ces jeunes managers que j’initiais au leadership personnel me confiaient les tensions et le repli sur soi vécu dans les équipes. La trop longue incertitude sur le choix des licenciements, dans le cadre d’un plan social annoncé pourtant depuis plusieurs mois, avait tellement dégradé le climat qu’il devenait impossible de maintenir une performance, pourtant vitale pour l’avenir.

Un des enjeux de la promotion du développement personnel au travail est aussi de développer les managers pour qu’ils sachent déjà mieux se protéger des sources de stress, mieux le gérer et éviter de le transmettre à leur équipe.

Ils pourront ainsi être mieux armés pour contribuer à sa prévention, par un management plus serein et plus  propice à la qualité de vie au travail…

Extrait de « Les nouvelles clés du développement personnel au travail pour concilier qualité de vie et performance durable » – A paraitre – Inter-éditions – DUNOD – 2016 -

8/07/14

Développer notre intelligence du sens

Le développement personnel du manager passe par le développement de son intelligence identitaire, autrement dit « l’intelligence du sens »… Dans l’entreprise, nos grands changements sont aussi et avant tout aujourd’hui « identitaires ». Face à la poussée gestionnaire, c’est bien là qu’il s’agit de les accompagner. C’est aussi une des voies pour développer l’écologie managériale et mieux concilier qualité de vie au travail et performance durable…

L’identité est une question qui a toujours interrogé l’homme : « qui suis-je », pour moi et pour l’autre.

Si nous possédons un grand nombre de fonctionnements communs avec les mammifères, comme nos instincts et nos émotions primaires, nous nous distinguons d’eux par la conscience de notre identité. Dans l’évolution des espèces, le « qui suis-je » marque pour ainsi dire la « naissance » de l’homme, par l’apparition de la conscience et du besoin de sens. Et cette conscience nous ouvre aussi à celle notre mortalité et à nos peurs existentielles. Si  « je suis », c’est aussi qu’un jour « je ne serai plus », que je suis éphémère, une simple parcelle d’énergie, une poignée d’atomes, une poussière d’étoile …  La question de l’identité nous conduit ainsi de la défense de notre ego, vers des niveaux de conscience plus élevés, que JUNG, conceptualisa dans la notion de « Soi ». Et oui, la connaissance de ce « Soi » et différente de la connaissance du « Moi ». Elle nous entraîne vers la conscience spirituelle  : « je suis » une partie d’un tout, je suis un élément du « tao », une parcelle de la grande chaîne du vivant, un petit bout de notre infiniment grand, avec  ou sans « dieu » …

L’identité est aussi la question de l’alignement ou de la cohérence personnelle. Ce que je fais, est-il aligné avec ce que je suis ? Suis-je en accord avec moi-même ? Suis-je aligné avec mes valeurs ? Y a-t-il une cohérence entre « ce que je suis », « ce à quoi je crois », « ce que je dis » et « ce que je fais » ? L’alignement avec nos valeurs nous renvoie à la relation à notre système moral et à notre éthique. Cela nous pose aussi à la question de notre leadership personnel. La force du leader dépendra pour beaucoup en effet de son niveau de cohérence avec ses valeurs et ses convictions.

Notre identité croisera aussi, dans l’évolution de l’homme, la question de notre territoire. Territoire matériel (ma maison, ma voiture, mes biens, mes clients…), affectif (mon conjoint, mes enfants, mes copains…), territoire aussi identitaire, avec nos valeurs, nos croyances, nos idées… Notre « territoire » émane de notre identité. Nous savons que c’est notre colère qui nous permettra – comme tous les mammifères que nous sommes – de le défendre et de nous protéger.

Dernière question, celle de l’origine et du développement de l’identité. Ce que je fais est-il lié à ce que je suis ? C’est-à-dire que mon identité, ce que je suis, détermine-t-il mes comportements, et pour tout ou partie, ou inversement ? L’identité évolue-t-elle dans le temps, ou est-elle prédéterminée, pour tout ou partie ? L’identité est-elle immuable ou en permanente reconstruction ? C’est aussi la question des automatismes identitaires que sont nos « drivers », nos croyances et, avant cela, notre « scénario de vie » et leurs racines transgénérationnelles…

Le développement personnel dans ce domaine, c’est la prise de conscience de nos niveaux d’identité. Et son plus grand bénéfice n’est-il pas de nous redonner une plus grande latitude d’action, sortir de notre « destin », en nous projetant consciemment par exemple dans un « projet de vie » ou une « vision personnelle ».

Et dans les organisations, la conscience identitaire  n’aide-t-elle pas aussi le manager à être plus puissant et équilibré ?

Comme nous l’avons souvent évoqué, la mutation que nous vivons crée une crise avant tout identitaire et donc de sens. Nos équilibres tant personnels que collectifs sont très dépendants de la cohérence de nos identités.

Au plan individuel, une personne à l’identité fragilisée souffrira davantage de mal-être au travail, entrera plus facilement en stress ou se désengagera. L’incohérence identitaire par exemple entre nos valeurs et les exigences de notre organisation provoquera a minima notre retrait, voire différentes formes de souffrance au travail. Elle pourra, dans certains cas graves aller jusqu’au suicide. Ne dit-on pas au bord du gouffre, que « sa vie n’a plus de sens » ?

Chaque organisation dispose aussi d’une identité, née de ses fondateurs et qui va se traduire dans une culture. Sa « mission métier » (ou « vocation») est en centre de son identité. Elle doit donc rester le plus possible en cohérence avec son système de valeurs, autre élément structurant de sa culture. Le risque si non n’est-il pas aussi pour une organisation, de perdre son âme ?

Une entreprise qui a perdue ainsi son identité ou sa culture, par exemple suite à de trop nombreuses fusions, provoquera l’affaiblissement du lien social, donc moins de coopération, du désengagement, ou si le marché de l’emploi le permet, un fort turn-over, avec le risque de la perte de ses compétences clés.

Il faudra être très vigilant à bien accompagner ce niveau d’évolution. La transformation managériale nécessitera inévitablement des actions de « développement identitaire » des managers, plus que de leurs compétences stricto sensu. En effet, une personne ne pourra jamais agir avec efficacité si ses moteurs identitaires, des valeurs ou encore de sa « vocation métier », ne sont pas au rendez-vous.

« Nous » ne pouvons également coopérer si notre identité collective est trop affaiblie ou incohérente. Les valeurs sont, comme nous le savons, « ce qui vaut pour un collectif ». C’est le driver inconscient le plus puissant du lien social. Il est aussi à l’origine de nombreux séismes géopolitiques et de beaucoup des conflits qui ensanglantent la planète.

Arriver à mieux piloter la transformation identitaire et culturelle de nos organisations nécessitera une connaissance et un niveau de conscience élevé de ses dirigeants et du management, que seules peuvent apporter la psychologie et le développement personnel.  Or, aujourd’hui, la plupart des managers et dirigeants que je côtoie sont encore peu au fait de ces nouvelles clés. Dans les époques chaotiques que nous traversons, mieux connaitre ces mécanismes et ces techniques, n’est-il pas pourtant devenu indispensable à la performance ?

Mais comment faire ?

Il s’agira ici comme avec l’intelligence des émotions, de développer ce que j’appelle l’intelligence du sens (IS). Les mécanismes identitaires sont des ressorts parfois plus inconscients que nos émotions primaires et tout aussi puissants. Il nous faut donc absolument mieux les comprendre pour mieux les dompter et les intégrer au leadership des managers ou à l’accompagnement des changements.

Les 4 étapes de développement 

La suite dans mon prochain livre …   »Transformer l’homme pour transformer le management » …

24/11/13

Stress et spiritualité

Conversation de taxi … un dimanche soir … sur la route d’un séminaire sur les RPS

D’habitude,  avec les chauffeurs  de taxi, je parle toujours au départ de météo et de foot, pour lancer la conversation … mais ce soir là…, je fus pris « aux mots », j’allais à la « Part Dieu », dont j’appris que ça voulait dire  « terre bénie des dieux », et  je me rendais près de Toulouse,  pour un séminaire sur la prévention des Risques Psychosociaux,  plus précisément  à « l’Abbaye de Sorèze », un autre lieu sacré, au pied de  la Montagne Noire…

-          Bonsoir ; Vous allez-où ?

-          La Part Dieu svp ; je prends le TGV pour Toulouse

-          Alors ce match ? On va le gagner ?

-          Euhhh, le foot, moi … vous aller faire quoi à Toulouse … ?

-          Euhhh…. de la formation …

-          Quoi comme formation ?

-          Eueuhhhhh : A la prévention du stress

-          A bon ? Pour  le stress, vous savez, il vaut mieux arrêter de travailler !  Y a que les vacances … la formation ça ne sert à rien. Ou alors, contre le stress… mais c’est autre chose … c’est difficile d’en parler … il  y a …. comment dit-on déjà ? … les spiri… spiritu?

-          Les spiritueux ?

-          Non « spiri…tu…alités », SPIRITUALITES,  je veux dire … Il y a Dieu … contre le stress, il y a Dieu ; Si vous vous connectez avec Dieu, vous n’aurez plus jamais de  stress … C’est mieux que la formation…

-          Sans aucun doute …

-          Et vous, vous croyez en Dieu … ?

-          Euhhh … Je crois en la Nature … je crois … aux valeurs qui nous unissent… , pour moi DIEU, c’est  … un état de conscience…

-          Votre perception de Dieu ressemble à la mienne et à celle de l’ISLAM…  Pour les Chrétiens, Dieu avait une grande barbe blanche … Dans l’Islam, Dieu ne peut être représenté sous forme humaine… C’est, comme vous le dites…

-          … la nature, l’univers, l’unité… ?

-          Oui, la nature, c’est important… c’est une façon de rencontrer Dieu … Et il faut aussi le remercier… il y a aussi la prière… Priez dieu et vous n’aurez plus de stress ! Et Quand nous sommes en contact avec Dieu, nous sommes Dieu…

-          C’est une bonne méthode ! Mais je ne sais pas si je pourrais en parler demain … Et vous, vous pratiquez ? Seul ? Avec un collectif ? Vous priez ? Vous méditez ?

-          Je médite seul, mais la ferveur la plus puissante je la trouve en collectif ; nous sommes tous unis. Et Quand vous êtes connecté à Dieu, les problèmes ne sont plus les mêmes…nous sommes reliés… le stress c’est la solitude…

-          Oui, d’ailleurs… partir seul un dimanche soir dans la nuit…, j’ai un peu de stress, j’espère que mes séminaires vont bien se passer … !

-          C’est où au juste, vos formations ?

-          A l’Abbaye de SOREZE… C’est le bout du monde… J’ai encore de la route après Toulouse

-          Ca devrait le faire, c’est une abbaye ! Dieu sera avec vous

-          Allah Akbar donc ! Nous sommes  arrivés à PART DIEU, combien je vous dois ?

-          15,25 avec la valise

-          … Et au faites, c’est quand le match retour ? … Vous ne pourriez pas prier pour eux ?!

Je ne sais pas s’il a prié, mais l’histoire dira, dans le TGV du retour le mardi soir à 21h,  qu’ils allaient gagner 3-0, les Français … Et à chaque but, le contrôleur SNCF qui annonçait avec ferveur la progression de nos … dieux du stade…

Tous unis ?

Pierre-Marie

 

 

 

 

Lire la suite

14/09/13

Un salarié heureux en vaut deux !

« Et s’il valait mieux avoir des salariés heureux…, surtout en période de crise »,

« Et s’il valait mieux avoir des salariés heureux…, surtout en période de crise », titrait « La Tribune » avant l’été, s’appuyant sur une étude du très sérieux Financial Times. J’avais été moi-même très surpris qu’un média si engagé dans la performance financière que l’EXPANSION s’intéresse au développement personnel dans les organisations, jusqu’à publier 10 pages de mes tumultueuses réflexions de l’été 2012 sur l’éthique dans les organisations et le management !

Pour la Tribune, cette année, « le bonheur est bon pour les affaires. (…) S’il n’est pas scientifiquement démontrable, le fait est que les salariés les plus heureux déploient une énergie plus importante. Ce qui peut passer pour un détail semble ne pas en être un dans la quête d’une productivité toujours plus poussée. Les plus heureux gagnent plus d’argent et sont plus efficaces. Ainsi, « les gens heureux gagnent plus d’argent et sont en meilleure santé (comprendre « passent moins de temps en arrêt maladie, hors du bureau ») et sont plus créatifs pour résoudre les situations problématiques », explique le Professeur Scollon, psychologue cité par le journal britannique. De cette façon, les chercheurs démontrent l’impact que peut avoir le bien-être des salariés sur la qualité du travail(). Ce qui a conduit certains économistes à se rendre compte de l’importance de la psychologie dans la résolution de problèmes économiques ».

Autre exemple remarquable des évolutions de l’intérêt du développement personnel en entreprise, nous assistons à l’expansion rapide des formations à la méditation dans les sociétés de l’ouest américain. Assiste-t-on à un nouvel essor du new âge ou au début d’un véritable basculement vers une nouvelle civilisation moins matérialiste, comme l’annonce de nombreux observateurs philosophes aussi bien que scientifiques depuis plusieurs années ?[1] La vraie nouveauté, en fait, est l’importance donnée à ces pratiques non plus uniquement dans la société civile, mais aussi dans les entreprises, avec, par exemple, d’importants programmes de connaissance de soi et de formations aux pratiques de méditation ou contemplatives. Ce qui est le plus interpellant, c’est que ce ne sont pas n’importe quelles entreprises, mais celles qui – pour le meilleur et pour le pire – ont changé notre manière de vivre, comme Google et Facebook, qui forment leurs salariés à la méditation et à la pleine conscience… Les grandes firmes de l’ère numérique s’intéressent ainsi de plus en plus aux pratiques contemplatives. Le journal de l’INRESS propose ainsi un article intéressant sur ces méthodes (que je duplique ci-dessous). Elles commencent aussi à se répandre en Europe, avec par exemple à Lyon cette année, une conférence qui a vu 70 managers de la CGPME tester avec ravissement les effets de la méditation…

Le monde des affaires, les entreprises et particulièrement les géants du web semblent donc de plus en plus s’intéresser au développement personnel et à la psychologie, comme facteur de qualité de vie au travail et de performance. Si nous observons le phénomène avec un œil positif (qui est souvent le mien !), peu importe le prétexte, si nous contribuons à faire grandir en conscience nos dirigeants, les managers et leurs équipes.

Mais les financiers ont-ils une âme (?) me rétorqueront les plus pessimistes de mes collègues  (!), y voyant une nouvelle tentative de manipulation.

Je me demande simplement, sans polémiquer, si cette nouvelle « spiritualité sans dieu », comme l’appelle le philosophe André Le Compte Sponville, vénérera-t-elle un jour autre chose en entreprise, que l’argent et le profit ? Les valeurs du développement durable, au-delà des normes et des nouveaux marchés, nous ouvriront-elles les voies « d’en haut », de la responsabilité et de la sagesse ?  C’est un peu en fait aujourd’hui comme si l’entreprise dans ce nouvel élan de « développement personnel » n’avait retenu du fronton du temple de Delphes, que le début de la phrase « connais-toi toi-même », oubliant avec Socrate la suite du célèbre précepte : « …. et tu connaîtras l’univers et les dieux ».

Mais permettez-moi d’être un peu plus optimiste, sur la nature humaine… S’il existera toujours de purs mercenaires sans foi ni loi dans nos entreprises et aussi des politiques parfois bien peu modélisants …, je côtoie suffisamment de managers et de dirigeants pour observer une véritable montée progressive en conscience.

C’est vrai qu’ils sont souvent pris dans leurs propres dilemmes et incohérences nos dirigeants, mais ne le sommes nous pas chacun au quotidien, nous aussi écartelés parfois entre ombre et lumière, entre nos peurs, nos soifs de posséder et nos aspirations plus éthiques ou « écologiques » ?

Et si, avant de lyncher Marie-Madeleine, nous acceptions une rapide introspection avant de lui jeter la première pierre ! Et si nous suivions à nouveau Gandhi dans ses sages inspirations : « sois  le changement que tu veux voir dans le monde » ?


[1] Dont  André Malraux. « Depuis cinquante ans la psychologie réintègre les démons dans l’homme. Tel est le bilan sérieux de la psychanalyse. Je pense que la tâche du prochain siècle, en face de la plus terrible menace qu’ait connu l’humanité, va être d’y réintroduire les dieux. »

———————————————-

Mindfullness et méditation au travail

(article  INRESS, sept 2013)
Un vent de spiritualité souffle sur la Silicon Valley. De plus en plus d’entreprises, comme Google ou Facebook, forment leurs collaborateurs à la méditation et à la pleine conscience. De quoi vraiment changer la donne ?
La scène se passe au siège de Google, dans la Silicon Valley. Assis en demi-lotus dans une salle de réunion, des salariés du géant californien se concentrent sur leur respiration. Inspiration, expiration… Petit à petit, les autres pensées s’amenuisent, l’esprit se calme. Prochaine étape : une méditation sur le succès et l’échec.

Le cours est très officiel : il fait partie du programme Chercher en soi, auquel ont déjà participé un millier d’employés. En attendant de pouvoir y assister, quatre-cents suivent d’autres formations internes comme L’auto-piratage neural ou Gérer son énergie, arpentent en méditant le labyrinthe construit à cet effet, mangent deux fois par mois en silence lors de « déjeuners conscients »… Après avoir mis à la disposition de ses collaborateurs des salles de gym, des massages et des repas bio gratuits, Google aurait-il décidé de se préoccuper de leur paix intérieure ?

La tendance n’a rien d’anecdotique : dans la Silicon Valley, les grandes firmes de l’ère numérique s’intéressent aux pratiques contemplatives. Ainsi, les cofondateurs de Twitter et Facebook organisent régulièrement en interne des séances de méditation, et s’orientent vers des méthodes de travail qui favorisent la pleine conscience. L’hiver dernier, la conférence Sagesse 2.0 a attiré à San Francisco plus de 1700 participants, parmi lesquels des dirigeants de LinkedIn, Cisco et Ford. Google a créé un Institut qui enseigne la méditation à qui veut. Des sites Internet tels que Dharma Overground ou Buddhist Geeks font fureur, des cours de méditation par Skype voient le jour, de même que diverses applications pour accroître, par exemple, son attention.

Ne faut-il y voir que l’énième lubie d’une région qui a déjà engendré les hippies et le New Age ? Un nouvel outil d’image de marque ? Ou la volonté d’améliorer le bien-être des salariés… donc leur créativité et leurs performances ? Là-dessus, aucun doute : la méditation est un outil précieux, accessible à tous, permettant de réduire le stress, réguler ses émotions, booster sa mémoire et sa concentration, renforcer l’efficacité de son raisonnement et de ses actions.

Mais pas question d’aller vers des horizons moins délimités. Dans ce milieu d’ingénieurs et de techniciens, il faut parler le langage de la rationalité. La légitimité de la méditation la puise dans les neurosciences, l’évolution biologique, les études scientifiques. Mais n’est-ce pas faire que la moitié du chemin ? Comme le soulignent certains, Steve Jobs a passé beaucoup de temps assis en lotus, ça ne l’a pas empêché de sous-payer certains collaborateurs, vilipender ses employés ou garer sa voiture sur les places réservées aux handicapés !

Pour autant, l’affaire fait son chemin. L’expérience de la méditation et la découverte des principes bouddhistes peuvent induire une prise de conscience. Surtout chez ces professionnels des réseaux sociaux, dont le métier est l’interconnexion ! C’est ainsi qu’un cadre de Facebook, en écoutant Jon Kabat-Zinn, a décidé de promouvoir la compassion, en améliorant la façon dont l’entreprise répondait aux attaques, disputes et bassesses qui sont le quotidien des réseaux sociaux, via des outils de modération plus personnels, plus empathiques, plus conversationnels. Chez Google, on dit aussi que la méditation est un moyen de développer l’intelligence émotionnelle des collaborateurs, leur sens de l’interconnexion et leur capacité à se mettre à la place de l’autre…

A leur profit ? Pour l’instant peut-être. Mais une chose est intéressante : ces nouveaux chantres de la méditation sont les inventeurs d’outils qui ont changé nos vies. Leur art de transformer une idée de niche en gigantesque mouvement de société est avéré. Paix intérieure chez Google aujourd’hui, paix dans le monde demain ?

A méditer !